Petite leçon de finances publiques à l’usage de l’actuel et de l’ancien Maire de Vernon
Par Alain Rey • 1 avr, 2009 •
Les mauvaises expériences sont parfois très utiles, attaché d’enseignement et de recherche à l’Université Panthéon-Assas-Paris 2, j’ai eu le redoutable privilège de siéger dans une commission d’harmonisation des notes présidée par Monsieur le professeur Jean-Claude Martinez, à l’époque premier vice-président du Front National et député Européen, homme de grands mérites universitaires et ayant le redoutable talent de savoir se parodier : “Vous direz bien Rey que j’ai défendu cet étudiant de couleur, personne ne le croirait sinon !” (le PS n’avait pas encore inventé le vocable “diversité” ! )
“Grand Maître” de l’étude des finances publiques, il avait l’habitude de donner à ses thésards un inattendu sujet d’étude : Les budgets de villes qui comptaient des élus du Front National au sein de leurs Conseils Municipaux !
Autre particularité de cet enseignant né, pour nous convaincre que telle “étudiante de couleur” n’était pas digne d’avoir une mention “Très bien”, il reprenait en les commentant ses principaux travaux. Cela était très instructif pour ceux qui laissaient de côté le dégoût qu’inspirait un tel “personnage” et s’efforçaient (Ce qui n’est pas toujours chose aisée) de n’entendre que l’Universitaire livrant son savoir, en quelques phrases.
Chacun a pu voir récemment une vidéo de Monsieur le Maire de Vernon, expliquant doctement qu’il était vital, avant toutes choses, de réduire massivement la dette de la ville de Vernon !
Pour mesurer l’inanité de cette déclaration en période de crise, il suffit de s’être un jour intéressé à l’étude de la crise de 1929, même sans avoir parcouru les ouvrages que Jacques Néré, Galbraith ou Arthur Schlesinger ont consacrés à cette période.
Certes, Monsieur le Maire de Vernon bénéficie de circonstances atténuantes. Pour en prendre la mesure, il suffit de se reporter au blog (assez confidentiel), Vernon Réussite animé par l’ancien Maire de Vernon, Monsieur Jean-Luc Miraux, qui lui met en avant la dette abyssale que creuse son “jeune” successeur : “En un mot, le Maire dépense plus d’argent qu’il n’a de ressources. Connaissez-vous beaucoup de gens qui dépensent 100 Euros de plus, quand ils n’en gagnent que 30 ? !...”
Cette référence au bon sens populaire en matière financière est une figure imposée pour un homme de droite et cela explique la réaction de l’actuel Maire de Vernon qui voulant paraître sérieux et compétent, est contraint de proclamer qu’il réduira la dette de Vernon, quitte à accroître de ce fait les graves difficultés de cette ville.
Las, si nos deux édiles avaient été membres du jury présidé par le professeur Martinez, ils auraient appris :
que la gestion des finances publiques n’a rien à voir avec celle de finances privées et notamment (question piège dans une épreuve orale) que l’exécution forcée (”saisie par un huissier” pour un simple particulier) est une vue d’esprit sur une personne morale de droit public qu’en conséquence ce n’est pas le montant de la dette d’une collectivité publique qui importe (ses créanciers ne peuvent l’obliger à la rembourser ! ) mais le coût du service de la dette, c’est à dire des intérêts à régler... Et nous sommes en période de baisse des taux !
Une gestion attentive du coût de la dette d’une collectivité de droit public peut donc permettre d’en augmenter le montant sans en aggraver la charge !
Pour prendre un exemple simple, une dette de 100 dont le service est de 10% coûte 10 à la collectivité. Mais une dette de 1000 dont le service n’est que de 1% ne coûtera pas plus : toujours 10 !
Certes, m’objectera-t-on le Préfet peut “retoquer” un budget et même demander sur ce motif la dissolution du conseil municipal de cette commune pour mauvaise gestion. Il arrive aussi que le Président de la République prononce la dissolution de l’Assemblée Nationale (Article 12 de la Constitution). La dernière fois, c’était il y a douze ans ! Il neige parfois aussi en été !
Vernon perdant avec la fermeture du LRBA une masse salariale de trente millions d’euros, masse qui aidait grandement à la prospérité de la Ville, je doute fort que le Préfet de l’Eure ait en ce domaine la rigueur de la commission européenne, d’autant que la procédure de l’article L.2121-6 du CGCT exige un rapport détaillé justifiant une demande de dissolution du conseil municipal par décret pris en Conseil des Ministres.
Rien n’interdit donc à la ville de Vernon d’augmenter son endettement (si elle le gère ! ) pour créer localement les conditions d’une forte reprise économique, d’autant que les équipements publics n’ont rien de pléthorique dans cette ville, encore gérée comme au XIXe siècle !
Je tape ces lignes sans états d’âme.
Car, à cette époque, la ville de Vernon a notamment été dirigée par l’un de mes lointains parents, Jules Soret, Maire de Vernon de 1898 à 1910.
Pour terminer ce billet, j’aimerais insister sur le fait qu’en période de crise les hommes politiques en charge de collectivités publiques ont la grande chance d’être jugés sur leurs résultats pas sur ce que leurs oppositions peuvent dire de leurs gestions, uniquement sur ce qui résultera de leurs gestions, ce qui leur laisse une grande liberté d’action.
Vive la crise en somme... pour les dirigeants révolutionnaires ! Crédit photo : Librairie Lgdj.fr, Faq Logistique, Ville de Vernon
Tags : Collectivités locales, Dette, Eure, Finances publiques, Jean-Luc Miraux, Philippe Nguyen Thanh, Vernon, Vernon
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